Deux équations quadratiques de la forme x2 - bx + c = 0 et x2 - bx - c = 0, où b et c sont entiers, constituent une paire compatible si elles ont toutes deux des solutions entières. Par exemple x2 - 5x + 6 = 0 a pour solutions x = 2 et x = 3, tandis que x2 - 5x - 6 = 0 a pour solutions x = -1 et x = 6. En multipliant b par d et c par d2 on obtient une nouvelle paire compatible x2 - bdx ± cd2= 0; une paire compatible est dite primitive si b et c n'ont aucun diviseur commun. Existe-t-il d'autres paires compatibles primitives? Ce problème est basé sur l'article "Curious Consequences of Miscopied Quadratics" (Drôles de conséquences de quadratiques mal recopiées), par Jeffrey L. Poet et Donald L. Vestal Jr dans College Mathematics Journal 36:4 (septembre 2005), pp. 273-277. Nous avons reçu des solutions correctes de
Solution. La pluspart de nos correspondants et en particulier Bardoux, Bornsztein, Iaaouini, Ilic', Kais, Lim, LoPresti et Mir ont noté la connection entre les paires compatibles et les triplets de Pythagore (c'est à dire les triplets de nombres A, B, C tels que A2 + B2 = C2). Nous expliquerons cette connection en combinant les idées de nos correspondants. La solution à x2– bx + c = 0 est .
La parité de b2– 4c est la même
que celle de b, donc si
est un entier, il aura la même parité que b, donc x
sera entier. La réciproque est également vraie: si x
est un entier alors l'est également. De même, x2
– bx – c = 0 a des solutions entières
si et seulement si
est un entier. Par conséquent
b et c déterminent une paire compatible si et seulement si il existe des entiers r et s tels que r2 = b2– 4c et s2 = b2 + 4c.Théorème. Soit et . Si b et c déterminent une paire compatible primitive, alors est un triplet de Pythagore primitif; réciproquement, si A, B, C est un triplet de Pythagore primitif, alors r = A – B et s = A + B forment une paire compatible primitive dont les coefficients satisfont 2 b2 = r2+ s2 = 2(A2 + B2) et 8c = s2– r2 = 4AB. Démonstration. Supposons que b et c forment une paire compatible
primitive. Par définition on a
(r – s)2/4 + (r + s)2/4 = (1/4)(r2– 2rs + s2 + r2 + 2rs + s2)
Pour démontrer la réciproque, nous partons du triplet de Pythagore A, B et C = = b. Alors A et B ne sont pas tous deux impairs (autrement la somme de leurs carrés serait congrue à 2 modulo 4), donc c = AB/2 est un entier. Il est facile de vérifier que et sont tous deux entiers, qui sont les entiers r et s correspondant à la paire b, c (comme on l'a vu avant l'énoncé du théorème). De plus tout diviseur premier de b et c divise C (= b) et un des nombres A et B, et puisque A2 + B2 = C2 il divise nécessairement le troisième. Ainsi si le triplet A, B, C est primitif, alors la paire compatible b, c l'est également. On trouve dans les bouquins de théorie des nombres élémentaire la construction de tous les triplets de Pythagore à partir d'entiers m > n relativement premiers et de parité différente; en posant A = m2 - n2, B = 2mn, C = m2 + n2. En combinant ces connaissances avec les résultats ci-haut, on arrive à caractériser toutes les paires compatibles b, c à partir des paramètres m et n et d'un multiple arbitraire k: . L'équation x2 – bx + c = 0 a alors pour racines , et x2 – bx – c = 0 a pour racines . Ces paires compatibles sont primitives lorsque k = 1. Voici les premiers exemples de paires compatibles primitives.
Le résultat principal de Poet et Vestal dans l'article du College Mathematics Journal était un théorème semblable au nôtre. Ils ont ensuite réinterprété certaines propriétés connues des triplets de Pythagore en termes de paires compatibles. Par exemple, un nombre b a un facteur premier congru à 1 modulo 4, alors il existe une paire compatible de la forme x2 – bx ± c. De plus, si tous les facteurs premiers de b sont congrus à 1 modulo 4, alors cette paire compatible est primitive. D'autres question sont présentées (en anglais) sur le site de Vestal http://staff.missouriwestern.edu/~vestal/talks.html. Il y a d'autres façons élégantes d'approcher notre problème. Hecquet et Piloff présentent une famille de paires compatibles primitives à un paramètre: b = n2 + (n + 1)2, c = n(n + 1)(2n + 1). Fondanaiche a additionné les équations r2
= b2– 4c et s2 = b2 +
4c pour obtenir 2b2 = r2 + s2
qu'il a interprété comme une famille d'équations de
Pell. Il s'est servi de la théorie de ces équations pour
produire des paires compatibles primitives. Par exemple, en posant s
= 1, à partir de la solution r = 7, b = 5 (et
c = (r2 – 1)/8 = 6), on obtient une famille à
un paramètre à partir du vecteur X1
= en
utilisant la récursion Xn+1 = Xn.
Les solutions à cette equation b2 = r2
+ 1 sont
Notant que pour répondre à notre question il suffisait d'exhiber une autre paire compatible primitive, Dumortier s'est servi d'une procédure en Delphi pour générer toutes les paires compatibles b, c telles que c < 1000: 5, 6 |